Metz, 21 août 1939
Ma petite Renette chérie,
J'ai eu ce matin la lettre de scène qui, mais à midi, celle d'hier ne pas arriver ; c'est le dimanche qui me vaut cela ; il n'y a rien à faire la contre.
Rien de spécial ici. Les journaux commencent à s'inquiéter un petit peu et cependant il n'y a absolument rien de plus qu'il y a huit jours. Il est vrai qu'ils ont du retard et sont encore loin de voir la situation aussi sérieuse qu’elle l’est en réalité. La seule chose qui la rende dangereuse du reste, c'est le mépris avec lequel on l'a traité. Il ne sait-il Les Allemands font tout ce qu'ils veulent sans la moindre réaction de notre part. Une réaction énergique les aurait sans doute arrêtés mais il faudrait des actes et non des paroles.
J'ai vu Saxcé hier soir, il est venu passer un moment à la maison. Sa femme n'est toujours pas revenue. Elle n'est du reste pas à Orléans comme je te l'avais écrit mais pas Chartres. Totote va aussi bien que possible et en somme l'alerte se sera très bien terminée pour elle. Je voudrais bien voir revenir Mme de Saxcé car cela me donnerait peut-être l'occasion de faire quelques bridges le soir. En ce moment il n'y a plus rien à faire et la maison n'a rien de particulièrement gai. Même pas la ressource d'aller au cinéma, car on ne donne absolument rien d'intéressant, et comme ça ne me dit rien d’y aller seul par-dessus le marché !
Nous avons eu une belle douche ce matin, elle s'est heureusement terminée juste assez tôt pour me permettre de revenir à la maison sans être trop mouillé.
Je te quitte, ma petite Renette chérie, en te pressant tout contre moi et en t'embrassant bien bien tendrement et de tout cœur.